Marie Voignier, Hinterland, 2009
Hors les murs

« Et si on changeait ? »

La Serre à Morsbronn-les-bains
20.09–06.10.2024
marie voignier, alain bernardini, morgane britscher, anna voreux, sylvie réno.

LA SERRE apporte l’art et la culture au coeur de nos campagnes, grâce à des
expositions artistiques éphémères qui font travailler autant les yeux que les neurones.
Au programme : une exposition, des ateliers et des rencontres pour apprendre,
s’amuser et être surpris.
En famille, avec des amis, entre voisins… LA SERRE est un espace convivial pour un
moment d’évasion, à côte de chez soi.
LA SERRE est un projet innovant à la fois culturel, rural et qui mise sur le local !

Et si on changeait ? Les cinq artistes de cette édition plongeront le visiteur dans une exploration confrontant l’utile et le futile, la réalité et les apparences.
Il ne s’agit pas de choisir son camp, mais plutôt de se laisser surprendre !

Programme

TÉLÉZ, L’ABONNEMENT
SYLVIE RÉNO

TéléZ est une oeuvre offerte par l’artiste à la Conserverie en 2013. Après appel à candidature, un abonnement d’un an à TéléZ (magazine hebdomadaire de programme de télévision) a été attribué à une personne sur lettre de motivation.

« Aux portraits des célébrités qui ornent la couverture de chaque numéro, j’ai substitué mes propres portraits. Durant 52 numéros, j’ai déroulé ma vie, de ma naissance à aujourd’hui.

La personne recevait TéléZRéno par la poste avant que ne débute la semaine de programme couverte par le magazine, du samedi au vendredi suivant. L’abonnement a débuté la semaine du Samedi 1e mai / Vendredi 7 mai 1999 et s’est achevé par celle du Samedi 22 avril / Vendredi 28 avril 2000. »


MORSURES
ANNA VOREUX

En 2018, je me suis fait mordre par le chien de mes parents, un jeune mâle beauceron de trois ans. Une morsure au sein gauche qui laissa une marque profonde ainsi qu’un hématome. Je décidai d’observer et de photographier au microscope les croûtes tombées de la blessure.

La technique de l’aquatine et de l’eau forte se sont alors imposées comme les médiums adéquats pour représenter cet événement : révéler la morsure par morsure dans l’acide.

D’après certains chercheurs éthologues, le chien peut parfois considérer la famille comme une meute et comme faisant partie de celle-ci. Ainsi, il intègre un schéma hiérarchique entre les différents individus la composant et lui-même. Ayant grandement participé au dressage de ce chien, il aurait exprimé, par cette agression (arrivée lors d’une réprimande), un « remaniement » de l’ordre hiérarchique en me plaçant dorénavant en dessous de lui.

Cela révèle deux choses.

Premièrement, le suavage demeure. L’homme tente de contrôlerle vivant, de le dresser, de l’organiser mais quelque chose persiste et ressurgit parfois. L’animal reste animal et lorsqu’il attaque l’homme il nous met face au temps, où l’humain n’était encore qu’une proie parmi les proies. Nous avons beau être l’espèce dominante, nous sommes totalement vulnérables et démunis face à une attaque animale.

Secondement, le chien nous considèrerait comme son semblable. Il révèle alors notre propre animalité à travers sa manière de considérer sa relation à l’humain.

Inversement, cela ne manifesterait-il pas, aussi, une forme d’humanité chez « le meilleur ami de l’homme » ?


A EN PERDRE LE CIEL, MURMURE AU BOUT DES DOIGTS
MORGANE BRITSCHER

À en perdre le ciel est un projet interrogeant le déploiement des satellites SpaceX dans l’espace.

Le projet Starlink pensé par SpaceX, constructeur aérospatial américain, prévoit le lancement de milliers de satellites dans l’espace proche. Le projet prévoit un maillage complet autour du globe dans le but d’optimiser les connexions Internet, partout sur notre planète.

Space X n’est pas le seul, Amazon, Facebook et d’autres encore prévoient eux aussi de dominer les cieux. Ils vont envoyer et déployer des grappes de satellites.

Le ciel nocturne tel que nous le connaissons disparaitra et sera jonché, à chaque point du globe, de ces points lumineux et artificiels, visibles pour certain à l’œil nu.

Quadrillant le ciel, ces milliers de satellites, vont petit à petit faire disparaitre les étoiles de nos yeux, au profit

d’une pollution lumineuse spatiale, dépossédant par la même occasion, l’humanité de la possibilité d’observer,

d’admirer et de comprendre l’univers, créant des bouleversements innombrables. De tous temps l’homme a tourné son regard vers le ciel. Les étoiles filantes, sont à elles seules le symbole d’un espoir, d’un vœu.

À en perdre le ciel est mon souhait pour un ralentissement du monde, pour que nos yeux se portent sur nos cieux dans l’espoir d’un geste pour alléger notre passage sur cette terre.

À l’heure d’un monde qui poursuit sa course effrénée, je cherche, observe le ciel, compile des recherches et note les traces des étoiles filantes, je m’émeus de savoir qu’un jour, les étoiles que j’observerai ne seront plus que des météores artificiels.

À en perdre le ciel est une composition de dessins sur papier de verre noir, reprenant la mosaïque des capteurs, du télescope Blanco, utilisé depuis 1976 pour effectuer des relevés astronomiques et remarqué pour sa grande qualité.

Le 20 novembre 2019, ce même télescope a enregistré une forte perturbation du ciel, révélant ainsi par 19 lignes blanches le passage des trains de satellites Space X dans le ciel, rendant impossible l’observation de l’espace profond.


HINTERLAND
MARIE VOIGNER

Collection FRAC Alsace
Hinterland est un film documentaire qui présente le projet « Tropical Islands », une reconstitution d’un paradis tropical sous la forme d’un spa, un centre de bien-être et de vacances, totalement artificiel construit au cœur d’une région isolée de l’ex-Allemagne de l’Est.

« Tropical Islands » constitue en soi un espace contradictoire, explique Marie Voignier, puisqu’il est implanté sur une ancienne base aérienne de l’Armée rouge, sur laquelle, après le départ des Russes, a été construite une immense halle en forme de bulle, pour faire du transport de marchandises en zeppelin. Ce projet écologique a fait faillite.

Des investisseurs sont alors venus construire ce parc d’attraction touristique avec comme base idéologique « l’authenticité tropicale ». (…) Ce nœud spatio-historique étrange devient le symptôme contemporain d’un rapport complètement paradoxal à l’autre, entre capitalisme, mondialisation et xénophobie. » (1)

Le film propose une singulière mise en perspective d’un lieu avec son histoire. L’artiste, telle une journaliste, interroge avec sensibilité notre rapport au temps, à l’espace et à l’illusion. Dans un montage qui accentue les oppositions, le spectateur bascule entre le passé et le présent du lieu, le silence des plans contemplatifs et les monologues d’anonymes, l’intérieur et l’extérieur.

« Tropical Islands » est une utopie, un nouveau paradis simulé, phénomène d’une société.

« Un noeud qui fait sens, selon l’artiste, à une époque où l’aspiration à la mobilité et à la pluralisation des activités

de loisirs tente de s’affranchir des contraintes de l’espace et du temps. »(2)

(1) Marie Voignier, entretien avec Guillaume Désanges, Exit Express, mars 2009

(2) Marie Voignier, Sur les terres vierges du réel, entretien avec Emmanuelle Lequeux, Beaux-Arts Magazine n°320, p.69, février 2011.


LES RETARDATEURS #1, Cédric
ALAIN BERNARDINI

Collection FRAC Alsace
Alain Bernardini développe une réflexion sur la représentation du travail et sur la relation de l’individu au travail dans la société d’aujourd’hui, à l’heure de la dématérialisation du faire et de la virtualisation de la marchandise. Sa démarche s’est construite à partir d’une longue fréquentation d’ouvriers, auprès desquels il a observé comment, loin de sa nature de contrat, le travail était quotidiennement vécu, adapté et réapproprié.

Ainsi, ses photographies et vidéos montrent des travailleurs dans des moments de pause ou d’inaction, ou encore dans des attitudes de jeux qu’Alain Bernardini lui-même introduit dans les lieux de travail dans lesquels il intervient. Car le jeu est l’envers du travail, et considéré comme élément perturbateur du comportement professionnel.

Empruntant aux codes du documentaire, le propos d’Alain Bernardini se réclame d’une objectivité certaine. Mais il ne vise nullement à produire une représentation du travail fidèle à l’idéologie matérialiste qui a sous-tendu la pensée sociale et politique de l’époque moderne.

Alain Bernardini s’attarde au contraire sur les gestes et les moments d’une absence de production, a priori improbables et non conformes, desquels émane pourtant une réalité du rapport de l’individu à son cadre social. L’image du travailleur qu’il construit n’est pas l’icône classique de l’ouvrier, élément d’une chaîne de transformation de la matière première, mais plutôt une représentation aussi humaniste qu’esthétique et ludique. Texte de Olivier Grasser – 2007.


Plus d’informations :

https://www.laserresexpose.fr

A Télécharger

Partager cette page sur :